[Séminaire CREM] Complémentarité entre capital humain et infrastructure publique dans la spécialisation manufacturière

Présentation de Rimvie Enoc KABORE (LEDI, Université de Bourgogne)
Présentation de Rimvie Enoc KABORE (LEDI, Université de Bourgogne)

Résumé :

L’article étudie la complémentarité entre le capital public et humain sur l’avantage comparatif. Cette étude est motivée par l’importance que semble jouer le capital public, fondamentalement conçu sous la forme d’infrastructures. Si plusieurs études stipulent que l’offre des infrastructures peut se révéler être un déterminant important de la performance à l’exportation, les résultats sont ambigus quant au rôle du capital public. Une manière de l’expliquer c’est de prendre en compte le capital humain. Cet article offre une illustration théorique de la complémentarité entre capital humain et capital public puis teste empiriquement cette idée dans la spécialisation manufacturière.

Théoriquement, nous supposons que le capital public n’entre pas directement dans le processus de production des biens finals. Il est plutôt demandé par les producteurs des biens finals via le service intermédiaire (infrastructure publique). De plus, ce service intermédiaire est considéré comme un input « composit » qui utilise à la fois du capital public et humain. Une telle considération permet de ne pas considérer l’infrastructure publique comme juste du capital public financé publiquement (comme à l’accoutumé) mais plutôt comme un service. Ce qui implique qu’il y a une mise à disposition de cette infrastructure qui passe par le capital humain et met en évidence la complémentarité en capital humain et public. Ainsi, nous examinons le rôle du capital humain comme modulateur conditionnant l’utilisation effective de l’infrastructure publique dans la spécialisation manufacturière en mobilisant théoriquement un cadre néoclassique d’avantage comparatif élargit au capital humain pour prédire la structure de spécialisation. Nous trouvons qu’un pays possède un avantage comparatif dans le bien industriel pour un même niveau de capital d’infrastructure, s’il est relativement mieux doté en capital humain.

Cette prédiction théorique a également été testée empiriquement à travers l’estimation d’une équation réduite simple dérivée d’un modèle d’interactions entre dotations et intensité factorielle. Les tests empiriques à différents niveaux de spécifications, à l’aide d’un panel de 16 industries pour 35 pays sur la période 1999-2013, montrent que pour un pays dont la dotation en capital humain est relativement plus élevée, l’effet de l’infrastructure publique sur l’avantage comparatif dans le secteur manufacturier est très important. Concrètement, un pays dont la dotation en capital humain est égale à la moyenne plus deux (02) déviations standards, une augmentation de 1% du stock de l’infrastructure publique améliore l’avantage comparatif de 1.55%, toutes choses étant égales par ailleurs. En revanche, un pays qui a une faible dotation en capital humain (c’est-à-dire un capital humain situé à la moyenne moins deux déviations standards), une hausse de 1% du stock de l’infrastructure publique entraine une amélioration de l’avantage comparatif de 0.384%. Cet effet est encore plus important, lorsque nous contrôlons les chocs spécifiques aux pays au cours du temps ou que si nous prenons en compte les retards dans nos régressions. Nous soutenons que ces résultats sont conformes à nos prédictions théoriques. Nos résultats sont particulièrement importants pour les pays en développement, en l’occurrence les pays africains, car ils révèlent que ces pays peuvent développer leur secteur manufacturier même lorsqu’ils n’ont pas suffisamment accumulé beaucoup d’infrastructures publiques.